Le Tacheles menacé de fermeture : vers un essoufflement du mouvement alternatif berlinois ?

facebook twitter google tumblr reddit pinterest email

Le Tacheles est un étrange bâtiment de l ‘Oranienburgerstrasse au cœur de Berlin dans le quartier de Mitte. Il fait partie des nombreuses friches urbaines réhabilitées par la scène culturelle berlinoise et internationale après la chute du mur et s’inscrit dans la profusion de squats qui ont fait émerger dans cette ville tourmentée une culture alternative jeune et décalée.

Berlin devient en effet à la mode et est de plus en plus prisée des étudiants et des jeunes européens en manque d’originalité et de liberté. Le succès du Tacheles, connu internationalement, témoigne de cette attraction. Ce lieu, autrefois un grand magasin type « galeries Lafayette », concentre aujourd’hui des galeries d’exposition, un café, un cinéma et bien sûr des ateliers où vivent et travaillent les artistes qui animent le lieu depuis presque 20 ans.

Le Tacheles

« Tacheles » signifie dialogue en Yiddish ; or, le dialogue n’est plus de mise avec le propriétaire légal du lieu, le groupe immobilier Fundus. Ce dernier ne renouvellera pas le contrat de location signé en 1998 avec les soixante artistes travaillant sur place à l’époque, leur cédant le lieu pour la somme symbolique de 50 centimes par mois. Ainsi, les occupants sont sommés de céder le lieu avant la fin de l’année.

Rappelons que ce sont les artistes qui ont fait renaître cette ruine. Aujourd’hui, le succès populaire et touristique du Tacheles a fait prendre conscience au propriétaire de la valeur de ce lieu, qui serait désormais un des plus photographié de Berlin. La tentation du profit a donc pris le dessus et Fundus projette de construire un complexe « haut de gamme » tout en « conservant l’esprit du lieu ».

Cet exemple nous montre que Berlin, aussi alternative soit-elle, ne fait pas exception au processus de gentrification qui grignote insidieusement l’atmosphère populaire du centre des grandes villes d’Europe, qu’il s’agisse de Paris,de Londres ou de Barcelone. Plus qu’un espace public partagé et culturel qui disparaît, c’est un temple du mouvement alternatif berlinois qui s’effondre. On peut légitimement craindre que dans moins d’une dizaine d’année, la décadence des quartiers est-berlinois tendra de plus en plus à s’atténuer pour se transformer peu à peu en quartiers bobo « à la Oberkampf » à Paris.

Des squats, du partage créatif de l’espace urbain, il ne restera que l’image à travers les quelques fresques murales qu’on aura bien voulu laisser. Cependant, Berlin est une ville en changement constant et l’on peut espérer que de nouveaux quartiers, plus périphériques, tels Neuköln ou Moabit s’inscriront dans la continuité des mouvements alternatifs que connaît la ville depuis la chute du mur.

Il est encore temps d’aller visiter le Tacheles : si vous avez la chance d’y passer, renseignez nous sur les perspectives de lutte (s’il y en a, mais je n’en doute pas) mises en œuvre pour la sauvegarde du lieu.

facebook twitter google tumblr reddit pinterest email

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <s> <strike> <strong>