Pique-nique au dîner du siècle: ou comment bouffer les nouveaux chiens de garde

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Par BARBEROUSSE

Chaque dernier mercredi du mois le Siècle invite à diner ! Si toi aussi tu es parmi les 200 personnes les plus influentes de France, tu peux te payer un diner en ville. Mais le Siècle s’en fout, il te l’offre. Loin de ces clubs où « il suffit de payer 15 000 euros par an » (Challenges, n°34, du 4 au 10 mai 2006. Dossier « Les réseaux de pouvoir »), le Siècle est un club « select ». On n’y est qu’invité, et l’adhésion est gratuite. Chaque mois, le Siècle réunit ainsi à l’Automobile Club de France, place de la Concorde, des journalistes influents, des patrons influents (Denis Kessler, ancien patron du Medef accueille chacun à l’entrée), des hommes politiques influents, des hauts fonctionnaires influents, et tout ce qui influe peut y être discuté avant et après le repas pendant lequel un ordre du jour réglemente la discussion.

Popularisé par Pierre Carles dans son dernier film, Fin de concession, le dîner est désormais l’occasion d’un rassemblement hebdomadaire devant le Crillon, contigu au club des grosses berlines. C’est donc l’occasion pour les militants contre l’ordre médiatique de jeter à manger au Parti de la Presse et de l’Argent (PPA) lors d’un pique-nique en tous points mémorables, où Nathalie Kociuszko-Morizet manque bouffer un œuf (délicieux, car on a oublié de le cuire) en tentant une entrée discrète. Excellent moyen de planifier un pantouflage, Le Siècle permet à tout valet du gouvernement, de négocier un emploi juteux de gestionnaire d’entreprise privée le service de l’Etat étant moins rémunérateur que celui du grand capital.

Le Siècle est un excellent moyen de se faire inviter dans une émission de télévision pour un député en mal de légitimité « démocratique », ou tout voyou pédégeique désireux de, disons laver de vert sa firme esclavagiste décidément trop évidemment polluante. Mais le diner du Siècle est aussi l’occasion pour la Sardonie de se retrouver face à son ennemi, de dénoncer la collusion criante entre milieux d’argent et médias, le « pluralisme » étant ici représenté : de David Pujadas à Arlette Chabot ou PPDA… et même jusqu’à Nicole Notat, nouvelle président du club, poste auquel elle a remplacé Denis Kessler, ancien patron du Medef.

Les flics protégeant la réunion des voyous en col blanc imposent les slogans : « Police Nationale, Milice du Capital » fonctionne tellement que certains robocops semblent même avoir honte d’être là. Mais les képis font rempart de leurs boucliers pour protéger les Gros de la mangeaille prolétarienne qu’on leur lance; œufs et tomates n’auront pourtant pas été utilisés en vain.

A 20h, point de JT mais un panier à salade : la mayonnaise monte et nous sentons que les cars de police amenés au Crillon sont là pour être remplis. Vers 21h, les flics pressurent, avançant de quelques mètres toutes les dix minutes, et poussant les manifestants de leurs boucliers. On remarque alors que tous les flics ne semblent pas détester leur boulot. Ça expliquerait leur aigreur mais ça ne se vérifie simplement pas. A tel point que les exhortations au calme de leur chef ne suffisent pas à calmer les roquets du capital, et un gros flic sourit hideusement sous sa visière, simulant des coups de matraque sur nous autres, sympathiques pique-niqueurs. Le rendez-vous est alors l’occasion pour les policiers les plus chanceux de serrer la main aux invités qui fayotent…et souvent trébuchent contre les barrières posées, émus qu’ils sont de serrer le bras armé qui leur sert de gardes du corps payés par la société.

La tension s’accroit, et libérant la place autour du Crillon, les policiers nous encerclent. Mais une rangée simple de petits bleus ne suffit pas contre notre détermination ! Une dizaine de minutes plus tard, les assiégés réussissent une percée et se carapatent de l’autre côté de la rue Royale. Pierre Carles est parmi eux, qui retourne sans arrêt voir ceux qui n’ont pas pu décamper : il se fera reprendre.

Une avocate providentiellement sortie du Crillon monte sur son tricycle motorisé ; elle est marrante, et stupidement sceptique : « il y a toujours eu des manifs et il y en aura toujours », « parce qu’on doit toujours lutter contre une domination ? », « oui, la domination c’est vieux comme le monde »…et quelques minutes d’un dialogue idiot avec un dominant ont persuadé la police que je n’avais rien contre le maintien de l’ordre.

Après que même les journalistes encore peu éloignés du Crillon ont été « priés » de partir, un gardien de parking de chez Vinci tente d’entrer dans son lieu de travail, entouré par le cordon de la gendarmerie. C’est peine perdue pour lui : être noir et sans costard est rédhibitoire ; les gardiens de l’ordre social font leur travail habituel, rien de plus, et ce soir le Crillon sera interdit à la seule personne qui aurait eu une bonne raison d’y entrer.

Après que notre homme a réussi à entrer dans le saint des saints par un coup de fil à sa hiérarchie, la police se met à bramer. Entourés, quarante-cinq camarades sont emmenés dans le bus-prison. Partis nous informer sur leur nombre et leur destination, une camarade journaliste, carte de presse à l’appui, manque de nous faire embarquer dans le bus : les bleus n’apprécient visiblement la presse que quand elle sert leur employeur. Elle se fera finalement raccompagner au métro, comme une partie des camarades enfermés dans le cordon de flics.

C’est alors l’occasion de finir les dernières bouteilles, échanger les derniers au revoir : « on se voit dans un mois ! ». Au Diner du Siècle du mercredi 27 octobre, 20 militants s’étaient réunis, nous étions 200 ce mercredi 24 novembre… combien iront nourrir le PPA d’œufs et de tomates mercredi 22 décembre ?

Quand le collectif « sauvons les riches » décide de mettre la pagaille au Rotary Club, très prisé par le prince Jean lui même :

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