Portraits de casseurs de (g)rêve (1ère partie)

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Il y a désormais quelques temps que vous, étudiants grêveurs de tous horizons, avez pu voir réapparaître dans vos assemblées générales une espèce bien particulière de fanfarons. Parfois comiques ou bien rageurs, pathétiques ou chahuteurs, les anti-grève, anti-bloqueurs, anti-gauchos, anti-glandeurs s’acharnent à briser toute mobilisation estudiantine susceptible de perturber la routine de vos facs. Fervents défenseurs de la démocratie, représentants bruyants de la majorité silencieuse, militants d’un jour ou escrocs de toujours, le poisson rouge a décidé de s’intéresser à ces étudiants revanchards que les médias présentent comme des amoureux de la liberté d’étudier.
Portraits de casseurs de (g)rêve :

Le réac
Assis au fond de l’amphithéâtre, afin de ne surtout pas prendre part à ce qu’il juge être une grande mascarade, le réac peste, râle et tempête contre ces rebelles aux cheveux longs et idées courtes qui ne lui inspirent au fond que de la crainte et du mépris. A chaque fois c’est la même chose, il est persuadé que son pays, son beau pays est au bord du gouffre, en proie aux bolchévistes de toutes sortes. Sur les bancs de la fac notre ami réactionnaire a donc l’accent teinté d’amertume. De toutes façons, lui, ce qu’il retient des années 68 ce ne sont ni les barricades du quartier latin, ni la plus longue grève d’après-guerre mais bel et bien le charisme du Général de Gaulle face aux hordes d’ouvriers paresseux et de hippies débauchés. Comment donc espérer après ça qu’il puisse un jour soutenir une grève, fût elle générale?

Chacune d’entre elles le conforte au contraire dans l’idée qu’il fait partie de la France qui se lève tôt, prise en otage par une poignée de fous furieux allergiques au travail. Sa devise ? Travail, famille, patrie et surtout : « On fume pas pendant les AG !! ». Un brin hygiéniste, amoureux fou de la discipline, si cela ne tenait qu’à lui, sachez-le, la maréchaussée aurait déjà envoyé tous ces révolutionnaires casser des pierres sous le soleil de Cayenne ! Somme toute, la discrétion de notre ami réactionnaire ne doit pas cacher sa propension à fricoter avec les organisations d’extrême droite, et parfois même à appeler ses amis crânes rasés à débloquer vos universités.

L’hystérique
Arrivé à la fac à 7h du matin dans l’espoir de pouvoir assister à son cours de comptabilité analytique, l’étudiant paniqué n’a pas dormi depuis trois lunes. Tous les matins, il persiste à croire qu’il pourra passer au travers des piquets de grève installés par ses camarades. Hurlant au scandale, les yeux embués de larmes, il griffe, tire, pousse, insulte, et se jette dans la bataille en s’époumonant : « Laissez-moi aller en cours ! »

Acteur incontournable, digne des meilleures scènes du théâtre de boulevard, il se résigne en sanglots à assister à l’assemblée générale pour tenter d’ en finir une fois pour toutes avec le blocage.
Au premier rang de l’amphithéâtre, le visage rougi par l’émotion, le paniqué panique : à chaque fois qu’un étudiant gréviste prend la parole, il est au bord de la syncope. Lui, la seule question qui l’intéresse, c’est de savoir quand il pourra retourner en cours, quitte à haranguer parfois la foule avec des idées quelques peu farfelues: « les étudiants n’ont pas le droit de grève ; la démocratie, c’est de laisser les députés faire leur travail ; faire grève c’est être profondément égoïste; les blocages nuisent à la valeur de nos diplômes, et pire, une grève est synonyme d’échec scolaire, voire d’échec de plan de carrière . »

Faire grève,pourquoi pas, mais certainement pas dans les facs. Ne se souciant à aucun moment de la portée des débats qui se déroulent sous ses yeux, l’hystérique s’enflamme parfois et se prend pour le fer de lance de la démocratie en invoquant le droit fondamental d’étudier. Sa fougue et son acharnement font de lui un casseur de grève infatigable et déraisonné, prêt à tout pour parvenir à ses fins.

Terminons sur une note positive: rendons-nous compte ici que les grèves étudiantes ne nuisent pas aux carrières de tous… N’est-ce pas M. le ministre?

retrouver ce média sur www.ina.fr

Lire la suite : portraits de casseurs de (g)rêve, deuxième partie.

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5 commentaires sur “Portraits de casseurs de (g)rêve (1ère partie)

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