Une belle étoile rouge dans la brume

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Une vidéo réalisée par l’équipe du poisson rouge lors d’un entretien avec les auteurs est disponible ici, pour comprendre leurs pensées, leurs espoirs et leurs colères.

La lutte des classes semble une expression tellement grossière dans le microcosme culturel qu’on est à chaque fois étonné lorsque sort un bouquin qui parle un peu d’elle. Alors quand ce sont deux livres, à quelques jours d’intervalle, qui nous rappellent que quoi que puisse en penser Nicolas, la Commune n’est pas morte, c’est carrément l’hallu ! D’autant plus qu’en l’occurence, les deux livres en question semblent se répondre et s’enrichissent mutuellement (et pas seulement avec leurs titres !). Ces deux livres, ce sont Rouge dans la brume, de Gérard Mordillat (Calmann-Lévy) et la Belle étoile, de Jean Védrines (Fayard).

Avec Rouge dans la brume, Mordillat poursuit sur la lancée initiée avec ses deux précédents romans, les Vivants et les morts (adapté à l’automne dernier pour la télévision) et Notre part des ténèbres. Encore une fois, tout commence par un plan social, et encore une fois, la question de savoir comment et jusqu’où lutter se pose. On est ici en territoire connu, peut-être un peu trop connu se plaindront les esprits chagrins. Mais qu’importe, la pédagogie est l’art de la répétition, et il s’est écoulé suffisament de temps depuis Notre part des ténèbres pour qu’une piqûre de rappel s’avère utile.

Pendant que Mordillat explore les ressorts pratiques de la lutte, Védrines explore pour sa part les tréfonds de l’âme révolutionnaire, cherchant à comprendre les mécanismes qui poussent un jour l’Homme à se lever et à se battre. Au contraire d’un Stéphane Hessel pour qui l’indignation semble se déclencher sur commande, Védrines nous montre la complexité et la richesse du sentiment de révolte et met à nu ses racines.

Les deux romans mettent donc en scène des insurgés, en formation chez Védrines et au cœur de l’action chez Mordillat. Ce qui apparaît alors comme une évidence, c’est la continuité dans la lutte. Les révoltés de 2010 ne sont pas si différents de ceux de 1968, et finalement pas grand chose ne sépare Gioachino, une des figures centrales de la Belle étoile, de Carvin, héros de Rouge dans la brume. A travers leurs lectures, ils semblent même communiquer à travers le temps et l’espace.

L’autre continuité, c’est celle de la violence symbolique exercée par la bourgeoisie. De la puissance du langage bourgeois (à la manière bourdieusienne) chez Védrines, à l’humiliation des fleurs sur la lettre de licenciement chez Mordillat, cette violence est omniprésente dans l’imaginaire des deux livres, qui nous rappellent ce qui devrait être une évidence pour tout le monde : la bourgeoisie n’a qu’un seul rêve, voir disparaître cette classe ouvrière qu’elle abhorre. Mais les ouvriers sont tenaces, et restent indispensables économiquement. La solution pour les bourgeois serait donc de les rendre invisible symboliquement, c’est-à-dire culturellement, et elle serait presque arrivée à ses fins, si ces deux livres indispensables n’étaient pas là pour rappeler cette vérité : la classe ouvrière est toujours là, elle a des choses à dire, et on ferait bien de l’écouter.

Le Poisson Rouge étant par nature un être généreux, il ne s’est pas contenté de lire ces deux livres, il en a également rencontré les auteurs. Une vidéo de l’entretien a été réalisée, et elle vous sera bientôt offerte : restez en ligne !

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2 commentaires sur “Une belle étoile rouge dans la brume

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