Contrôler les contrôles !

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La publication hier d’un rapport du défenseur des droits a relancé le débat sur l’opportunité de mettre en place un récépissé lors des contrôles d’identité par la police. Autant le dire tout de suite, la mesure telle qu’elle est proposée par le gouvernement est tout simplement affligeante. Et la droite ne manque pas de le rappeler, en dénonçant un « laissez-passer pour délinquants ». Qui peut sincèrement penser qu’on puisse lutter contre les contrôles au faciès simplement en distribuant un petit papier ?

D’ailleurs, les contrôles au faciès sont-ils le vrai noeud du problème ? Ce n’est pas si sûr… Certes, en fin de mois, les fonctionnaires de police vont traîner devant les gares et contrôlent en priorité noirs et arabes en espérant tomber sur les fameuses ILE (infractions à la législation sur les étrangers) pour atteindre leurs objectifs sans avoir à trop se fouler. Aborder la question par le symptôme, les contrôles, ne réglera rien tant qu’on n’aura pas réglé le problème des objectifs chiffrés fixés aux agents.

Il ne faut pas pour autant disqualifier d’avance le débat sur les contrôles policiers, d’autant que changer légèrement d’angle permettrait de toucher à des problématiques nettement plus intéressantes. Il n’aura échappé à personne que les contrôles de police, comme le délit d’outrage d’ailleurs, sont devenus avec le temps un moyen de mise sous pression d’une partie de la population. A la différence du délit d’outrage cependant, les contrôles ne donnent lieu à aucun compte-rendu, aucune mesure, et les forces de l’ordre en abusent en toute impunité.

Evidemment, cet usage très foucaldien du contrôle d’identité n’était pas prévu lorsqu’il a été instauré. Le code de procédure pénal, en son article 78-2, est d’ailleurs très clair à ce sujet : le contrôle d’identité ne peut avoir lieu que lorsqu’il « existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner [d’une personne] qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction ; ou qu’elle se prépare à commettre un crime ou un délit ;  ou qu’elle est susceptible de fournir des renseignements utiles à l’enquête en cas de crime ou de délit ;  ou qu’elle fait l’objet de recherches ordonnées par une autorité judiciaire ». Autant vous dire que dans la masse des contrôles effectués par nos chers services de police, il y en a peu qui sont dans la stricte légalité.

Voilà donc où je veux en venir : quitte à mettre en place un reçu à chaque contrôle d’identité, autant en profiter pour mettre une petite ligne « raison du contrôle ». Evidemment, cette raison devra dès lors nécessairement être conforme au code de procédure pénale, puisqu’elle pourra être vérifiée. On peut espérer que ça découragera au moins un peu l’usage intensif et abusif du contrôle. Et puis ce serait un sacré progrès : nos voisins anglais, eux, ont ça depuis 1679. Ils appellent ça l’habeas corpus, et il serait temps qu’on s’inspire un peu d’eux pour une fois.

 

 

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