Grèce : la guerre au peuple

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Alors ça y est. Le parlement grec a adopté le deuxième plan d’austérité en quelques mois. Pour être clairs, plan d’austérité, en langage libéral, ça veut dire ça : « maitenant que je te tiens par les couilles, tu as intérêt à me donner tout ce que tu possèdes ». Qui a gueulé « racket » au fond ? PLAN-D’AU-STÉ-RI-TÉ on vous dit ! C’est pas vrai, ces gens qui veulent pas comprendre ce qu’on leur explique.

« Plan d’austérité ! », ça va finir par rentrer, oui ?

Retour sur l’affaire. Depuis que Financier et ses amis qui nous mentent ont découvert ce qu’ils savaient depuis longtemps, c’est-à-dire qu’en Grèce l’oligarchie préférait s’en mettre plein les fouilles plutôt que payer ses impôts (ça me rappelle quelque chose, mais quoi ?) et que Goldman Sachs trafiquait les comptes nationaux, ils se sont fâchés tout rouge. « Puisque c’est comme ça », qu’ils ont dit, « on te prêtera plus nos jouets à moins de 25% de taux d’intérêt ! ». Mais les Grecs, qui décidément ont tout compris à la vie, continuent de se la couler douce sous le soleil de Méditerrannée, et Financier se rend compte qu’il ne verra peut-être plus jamais la couleur de son argent, ni des gras intérêts que le taux d’usure qu’il pratique allégrement lui permettait pourtant d’espérer, alors Financier prend peur. Bin oui, Financier n’a pas l’habitude de prendre des risques, vous comprenez. C’est pas comme si c’était son métier non plus.

Il se passe quand même quelque chose de surprenant dans cette affaire. On peut comprendre que les banques n’aient pas trop confiance en la capacité de remboursement de l’Etat grec. On peut presque même admettre que du coup elles pratiquent des taux d’intérêts aussi élevés que ceux d’un credit revolving. C’est un peu leur spécialité, de piquer l’argent de ceux qui n’en ont pas. Là où on atteint les limites de la décence, c’est quand en plus elles réclament d’être remboursées à tous les coups ! Des connaissances en économie niveau CE1 suffisent pour savoir que quand on prête, on prend le risque de ne pas être remboursé et que c’est même à ça que servent les taux d’intérêts variables : à couvrir le risque.

Les Grecs, qui sont forts en maths depuis assez longtemps pour les avoir inventées (ou presque), ont bien compris que prêter de l’argent à un taux de 25% tout en exigeant d’être remboursé était une arnaque monumentale et ne sont donc pas vraiment chauds-chauds pour le plan d’austérité. La classe politique grecque et le gouvernement, qui ne gouverne d’ailleurs plus rien, tiennent pourtant absolument à sauver la face après avoir spolié leur peuple pendant 37 ans et sont prêts à tout pour satisfaire la troïka prédatrice : Banque Centrale Européenne, FMI et Union Européenne. Dans le berceau même de la démocratie, au coeur d’Athènes, le gouvernement grec a donc décidé de déclarer la guerre à son peuple. Car oui, les images qui nous viennent d’Athènes depuis mardi sont purement et simplement des scènes de guerre. En voici une petite sélection commentée par le Poisson Rouge.

Mercredi 29, la place Syntagma est inondée de gaz lacrymogène par la police. La scène est apocalyptique, ambiance Chemin des Dames avec masques à gaz pour tout le monde. Rappelons quand même que l’usage des gaz lacrymogènes est interdit par la convention de Genève en cas de conflit entre deux belligérants. Heureusement pour toutes les polices du monde, la convention de Genève ne concerne pas le maintien de l’ordre, et l’usage des armes chimiques contre les populations civiles peut se faire tranquillement sans que personne ne vienne déranger.

Du coup, les secours n’ayant plus accès à la surface pour cause de brouillard soudain et artificiel, le seul refuge possible était la station de métro, qui s’est transformée en un hôpital de fortune. Il fallait au moins ça pour pouvoir s’occuper des centaines de blessés.

La police grecque, qui comme la Guardia Civil espagnole a un peu de mal à perdre les réflexes qu’elle avait acquis durant la dictature, se sent pousser des ailes du coup, et se comporte comme une banale milice fasciste. Masques, menaces, intimidations et violences gratuite : quel beau programme !

C’est bien gentil tout ça, me direz-vous, mais des vidéos de violence policière, ça n’a rien de nouveau sous le soleil. On en voit quand même régulièrement, même chez nous. Et puis, guerre au peuple, guerre au peuple, peut-être mais pour l’instant il n’y a pas eu de morts hein, pas comme en Syrie par exemple.

Certes, certes. Mais il me semble qu’il est important de comprendre qu’on a franchi un véritable cap cette semaine. La répression des révolutions arabes en cours et passées est une répression « traditionnelle », celle d’un Etat remis en cause qui se défend à tout prix. Ce qui se passe en Grèce, c’est autre chose : c’est le début de la guerre des classes. La milice grecque avec marquée Αστυνομία dessus n’est plus une police nationale ni une armée au service d’un dictateur, c’est véritablement (au-delà des slogans) la milice du Capital contre le peuple qui refuse de se plier à ses injonctions. C’est la première fois qu’elle se met en ordre de marche au XXIème siècle, mais j’ai bien peur que ce ne soit pas la dernière.

Petit bonus avant de nous quitter. On n’a pas mis toutes les vidéos qui circulent évidemment, d’autant que vous en avez certainement déjà vu pas mal, entre celles qui montrent la banalité de la violence policière et celles où les provocateurs rentrent la queue basse chez leurs protecteurs. Sachez juste que notre source principale est le blog From the Greek Streets, sur OccupiedLondon.org, et que nous vous encourageons à leur rendre visite : leurs infos sont sans doute les plus à jour et les plus pertinentes sur le sujet.

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2 commentaires sur “Grèce : la guerre au peuple

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