Un pot de confiture géant

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« La culture », aiment à répéter les cuistres, qui en ont peu, « c’est comme la confiture : moins on en a, plus on l’étale ». Malheureusement, il semblerait que ce proverbe soit de moins en moins vrai. Prenez les patrons de majors du disque par exemple. Eux, de la culture, ils en ont un paquet à leur disposition. Des centaines de paquets même. Eh bien, le moins qu’on puisse dire, c’est qu’ils ont un peu de mal à la partager…

En effet, à l’heure où les bibliothèques mondiales se multiplient, où les plus grands musées du monde s’ouvrent aux visites virtuelles, où la quasi-intégralité des travaux de recherche du XXème siècle sont accessibles en un clic, le petit monde de l’industrie audio-visuelle apparaît comme le dernier bastion de la Réaction contre l’universalisation de l’accès à la culture. La raison en est simple : il s’agit d’une industrie, dont l’objectif est le profit. Et si organiser la prohibition culturelle peut lui permettre d’étendre son profit, elle n’hésitera pas à le faire. D’ailleurs, elle est en train de le faire un peu partout dans le monde.

Heureusement pour nous, toutes ces belles gens sont des quiches en matière de nouvelles technologies, et n’ont tellement rien compris à Internet que toutes leurs tentatives législatives de nous empêcher d’accéder à leurs « produits » ont été des échecs plus ou moins cuisants. Mais les marchands de culture ne veulent pas en rester là. Reflets.info, un site qui sait de quoi il parle, et qui en parle bien, nous explique que désormais, l’industrie du disque, avec la joyeuse complicité de certains FAI, veut purement et simplement s’affranchir de la loi, pour alléger nos portefeuilles avec une stratégie qui ferait rêver les directeurs de l’innovation de toutes les mafias du monde : nous faire payer pour pouvoir surveiller directement les données qui passent par nos connexions internet. Vous aimeriez, vous, donner de l’argent au vigile du Franprix pour qu’il fouille votre sac ?

Bref, on comprend assez vite que ce n’est pas demain la veille qu’on aura librement accès à la musique en France. On parle beaucoup de la musique, mais tout ceci est valable également pour l’industrie du cinéma, qui est un peu moins virulente dans ses prises de positions, mais tout aussi efficace dès lors qu’il s’agit de défendre son bout de gras. Et je ne parle même pas du jeu vidéo, royaume des DRM et des prix indignes.

Tout n’est pas perdu heureusement. Le décalage complet des majors avec les usages culturels de notre société, qu’elles aggravent d’année en année, finira bien par causer leur mort. Car ce décalage, s’il est évident en ce qui concerne la « consommation » (quel vilain mot) de la culture, n’est pas moins important en ce qui concerne sa production. Il ne faut pas se leurrer : aujourd’hui, sur certains réseaux de P2P, il y a des utilisateurs qui ont des catalogues plus importants, plus pointus, plus complets et mieux référencés que n’importe quelle major. Que celui qui trouve un éditeur qui est capable de concurrencer les fansubbers sur le terrain de la rapidité, de la qualité et du dynamisme me jette la première pierre, mais je reste indécrottablement optimiste sur la question : un jour, les parasites de la culture disparaîtront d’eux-mêmes, et nous, nous pourrons profiter du pot de confiture géant qu’Internet a mis à notre portée.

Moi, pendant ce temps-là, je retourne écouter l’intégralité de la musique Hindi, disponible sur Google India. Il m’en reste encore un paquet !

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6 commentaires sur “Un pot de confiture géant

  • Cool l’article

    L’Art project de google est vraiment très bien foutu.
    Par contre Google Scholar est nettement moins efficace que les bases de données scientifiques (payantes par contre), il y a quand même beaucoup moins de contenu.

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  • « Un jour, les parasites de la culture disparaîtront d’eux-mêmes, et nous, nous pourrons profiter du pot de confiture géant qu’Internet a mis à notre portée. » ou on pourra périr empêtré dans la confiture, les ailes poisseuses collées de sucre!

    Merci pour google india ! J’y vais aussi

    Tu penses quoi de la campagne de pub Hadopi ? M’est avis que c’est une faste foutaise.

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  • @Victor :
    Pour Scholar, je pense que ça dépend beaucoup des domaines alors. En économie et en sociologie, j’ai toujours trouvé ce que je cherchais, même si ça renvoie parfois vers Jstor effectivement.

    @Marc :
    Le seul moyen d’éviter la noyade dans le pot de confiture, c’est de la manger, et de la partager ! Mais pour ça, il faut d’abord y avoir accès 😉
    Quant à l’affligeante campagne Hadopi… d’autres en parlent beaucoup mieux que moi : http://reflets.info/hadopi-de-lusage-civilise-sain-et-pur-dinternet/

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  • Oui, je parlais seulement des publications scientifiques ! Je n’avais jamais essayé dans d’autres domaines.

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  • Je trouve le propos un peu simpliste.
    C’est sur que l’industrie du disque (et plus encore du cinema) produit des marges incroyables depuis plusieurs decennies, peut etre comparable a la periode d’or du commerce triangulaire.
    Pour autant faire un disque necessite des musiciens et des inges sons, du matos, et meme une camapgne de pub pour que les gens sachent que ca existe.
    Cet argent il faut bien qu’il vienne de quelque part pour atteindre la poche du groupe de musique (ou du producteur).
    Dans ce cas le tout gratuit n’est pas une solution.
    On remarquera en revanche que le monde du cinema francais dit d’auteur se porte bien, peut etre grace au financement et au soutien publique qu’il recoit.

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  • Ping : Poisson Rouge » Sortez de votre bocal ! » La deuxième cyber-manif de l’histoire

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