V comme… la voix de son maître ?

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Comme d’habitude, cet article n’engage que son auteur et pas Poisson Rouge dans son ensemble. C’est toujours le cas ici, mais, comme souvent, ça va mieux en le disant.

Sur Rue89, on n’aime pas Mélenchon. Dernier coup en date : d’une interview d’Eva Joly qui fait pas moins de 14 pages et aborde des sujets aussi divers que les affaires de corruptions du président-candidat, les langues régionales ou la haine qui anime Marine le Pen , Rue 89 décide de mettre en exergue en titre la seule allusion à… Mélenchon et son « programme des années 70″ ! On imagine que l’équipe d’Eva Joly a dû apprécier cette belle mise en avant de ses propositions.

On commence malheureusement à s’habituer. Le portrait que dresse la page de la Rue consacrée à Mélenchon est peu flatteur mais très symptomatique. Ainsi, on apprend que le candidat du Front de Gauche aime Carla Bruni (le social-traître !) mais pas les journalistes (le criminel !), qu’il est à la tête d’un « système » (c’est douteux tout de même) et qu’il veut faire main basse sur les syndicats (cet homme est vraiment dangereux !). Ses militants et sympathisants ne sont pas beaucoup mieux traités : entre les fachos repentis et les staliniens naphtalinés ressortis du placard pour les grandes occasions, il semblerait d’après la rue qu’on ne voie à ses meetings que des fanboys venus uniquement pour le show.

Ah il est bien loin le temps où Rue89 était ce site rebelle supposé apporter une nouvelle voix dans le paysage médiatique ! Le beau mot d’indépendance, répété jusqu’à plus soif lors du rachat par le Nouvel Observateur semble désormais oublié et bien caché sous le tapis. Rue89 n’est plus que l’écho sur la toile des délires auto-entretenus de la rédaction de l’Obs, la preuve par Mélenchon : l’hebdo lui consacre sa Une de cette semaine, et entre deux publicités pour des voyages à 2000 euros, on peut lire avec (au choix) surprise, abattement, résignation ou dégoût un déversement de haine sur le candidat du Front de Gauche, de « l’ami Buisson » à la critique ô combien éclairée d’un Daniel Cohn-Bendit des grands jours, en passant par un pseudo-éloge fielleux de Jean-Claude Guillebaud.

Mélenchon vu par le Nouvel Obs

Rien d’étonnant venant du Nouvel Obs de Claude Perdriel, qui a parfaitement le droit de rouler pour le parti socialiste. Rue89 aussi a le droit de soutenir celui qu’elle souhaite, même si cela est loin de l’image sur laquelle elle capitalise depuis quelques mois alors qu’il est désormais clair que la subversion n’est plus qu’un lointain souvenir dans les parages.

On peut par contre légitimement s’inquiéter de la stratégie mise en oeuvre pour soutenir leur candidat, stratégie dont la gauche socialiste est malheureusement coutumière : jouer la carte de l’extrême-droite pour faire baisser la gauche de la gauche. Parce qu’en regard des articles mesquins sur Mélenchon, c’est à une avalanche d’articles ouvrant grand les colonnes au Front National qu’on a droit. Cette publicité gratuite pour l’extrême-droite sous couvert d’une posture de combattant courageux a déjà été analysée ici, mais elle interroge fortement : la défense d’un candidat de gauche mérite-t-elle vraiment l’alliance objective avec ceux dont nous pensons ici qu’ils sont nos adversaires absolus ?

Au moment où la candidature de Mélenchon pourrait permettre de renvoyer le Front National dans les poubelles de l’Histoire politique française, dont il n’aurait jamais dû sortir, cette question se pose avec d’autant plus d’importance. Les « camarades » de Rue89 et de l’Obs, et Michel Onfray en particulier, feraient bien de s’interroger sur les conséquences de leur posture : vaut-il mieux pour nous tous un Mélenchon au plus haut et une Marine le Pen au plus bas, ou le contraire ? Personnellement, mon choix est fait.

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3 commentaires sur “V comme… la voix de son maître ?

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