Heygate : l’Utopie en démolition

facebook twitter google tumblr reddit pinterest email

Par Hamanullas.

Bientôt, les bâtiments du Heygate n’existeront plus. Les londoniens qui y vivaient ne comprennent pas tous cette décision. Après seulement 40 ans de vie, les détritus s’y sont entassés. Seuls quelques résistants sont encore là.

poisson rouge

Ils ne voulaient pas partir. Ces appartements contenaient toutes leurs vies, leurs souvenirs. Les habitants du Heygate ont pourtant dû se résigner. La pression et le bruit des travaux ont eu raison de leurs nerfs. Plus de force pour résister. Plus la force de rester chez eux.

Le Heygate est un ensemble de bâtiments situés au sud de Londres, en Angleterre. Nous sommes dans le quartier d’Elephant and Castle. Un quartier vieillissant que la ville veut redorer. Un re-développement à 1,5 milliard de livres (environ 1,8 milliard d’euros). Problème : le plan adopté par l’assemblée de Southwark en 2004 inclus également la complète démolition du Heygate. Démolition qui a débuté en avril 2011.

Pourtant, les bâtiments ne seraient pas défectueux et les problèmes d’amiante ont été réglés à la fin des années 80. De plus, le coût de démolition s’avère plus élevé que celui d’un ravalement. L’explication serait ailleurs. Le Heygate est  un endroit populaire qui a mauvaise réputation. Pauvreté, crime, vol et difficulté de la vie en communauté. James Smith, 63 ans, en a vécu 22 ici avant de déménager pour Nunhead en 2010. Il rapporte un changement pendant ces dernières années : « Les cages d’escalier étaient devenues le paradis des agressions. Impossible de sortir la nuit ». Une ambiance encouragée par l’architecture des lieux selon l’assemblée de Southwark. En cause : des allées sombres et de multiples cages d’escalier.

poisson rouge

Pourtant, beaucoup ne le voit pas du même œil. « La seule raison pour laquelle cet endroit va être détruit est que le terrain vaut des millions », raconte une ancienne habitante. Une parmi les 3000 qui vivaient là. Depuis 2008, petit à petit,  les appartements se sont vidés. Les familles ont dû être relogées après d’âpres négociations.

L’architecte du Heygate, Tim Tinker a finit son œuvre dans les années 70. Son idée était d’offrir un endroit de vie communautaire pour les premiers bénéficiaires de l’Etat providence après la guerre. Il désapprouve la destruction de cet endroit qui n’existe que depuis 40 ans: « Il n’y avait pas de problèmes jusqu’à récemment. Le comité a profité de l’opportunité ».

Désormais, les allées restent fantomatiques. La majorité des vitres ont été brisés et les portes solidement cadenassées. Mais au cœur du Heygate reste un lieu de vie. « The Better Elephant ». Des plantes, de quoi s’asseoir, quelques curiosités et un homme. Le dernier résistant que l’on a croisé ici.

poisson rouge

Il s’appelle Adrian Glasspool. Il est décidé à protéger ce qui lui reste. Au mois de mai 2011, il a reçu un avertissement pour « jardinage illicite ». Il s’explique : « Des détritus jonchaient le sol du quartier. On avait peur d’être infesté alors on a demandé à l’administration de venir nettoyer. Ils ne l’ont pas fait, alors on s’en est occupé nous-mêmes. Du coup l’idée de planter des légumes sur ce terrain nous est venue. De plus en plus de gens sont venus nous aider. Et maintenant il y a 20 ou 30 personnes qui utilisent ce jardin ». Adrian veut en profiter. Devant chez lui, des écriteaux invitent à mettre les mains dans la terre pour y planter des graines. Pour amener un soupçon de vie. Avant que tout ne soit détruit.

Pour l’instant, les bâtiments gardent le souvenir de ces familles. Les éclats de rire des enfants qu’on imagine sur le tourniquet rouge et jaune. Ce vieil homme qui, penché sur la rambarde, pleure à l’idée de partir. Et son chien qui ne veut pas qu’on l’emmène.

Mais bientôt, les bâtiments ne seront plus là pour se souvenir. La démolition devrait être achevée d’ici 2015. Les bâtiments feront place à 2500 maisons ou « appartement de ville ». Des maisons peu abordables pour les anciens habitants du Heygate. D’autres familles en construction sont à venir. L’histoire du turnover d’un quartier.

poisson rouge

facebook twitter google tumblr reddit pinterest email

5 commentaires sur “Heygate : l’Utopie en démolition

  • Je vois mal comment on peut pleurer sur la disparition de ces cages à poulétaires.

    Répondre
  • Le but n’est pas de pleurer mais de parler d’un quartier qui disparaît, ce que ça implique pour ceux qui y habitent et l’ambiance fantomatique intrigante de cet endroit. Esthétisme, dynamisme et envie de créer un nouvel espace dans une volonté de mieux: comment être contre dans l’idée. Penser aux vies que l’on déplace (parfois vers de moindre conditions): comment être contre également. Deux poids, deux mesures.

    Répondre
  • « Devant chez lui, des écriteaux invitent à mettre les mains dans la terre pour y planter des graines. Pour amener un soupçon de vie. Avant que tout ne soit détruit. »

    Si ça c’est pas du tirage de larmichette, excuse-moi …

    Répondre
  • Répondre

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <s> <strike> <strong>